Si on comprend l’hypersensibilité,alors on apprécie l’introversion et on accepte la timidité.

Incroyable comme à chaque fois que je m’intéresse à un sujet, celui-ci surgit de nulle part dans mon champ de vision à longueur de journée. Alors que c’est simplement parce que je n’y prêtais pas attention avant. Depuis que je décortique le sujet de la discrétion, les mots introverti, hypersensible et timide m’interpellent, car ils sont liés d’une manière ou d’une autre. Après avoir retourné la chose dans tous les sens, dans un éclair de génie intense, j’ai écrit cette phrase dans mon carnet : si on comprend l’hypersensibilité, alors on apprécie l’introversion et on accepte la timidité. CQFD. Pour moi c’est ça la discrétion. Cela ne parlera peut-être pas du tout à certain·e·s, mais avant de tout quitter, laissez-moi vous expliquer le cheminement de ma réflexion (pas toujours facile de mettre des mots sur des pensées qui partent dans tous les sens mais je sens que ça va me faire du bien). 

C’est partiii. Accrochez-vous.
(il est encore temps d’aller vous faire votre boisson chaude préférée
avant de commencer – j’en suis  à mon 5e thé)

Quelques définitions s’imposent.

Hypersensible.
Ah ça y est j’ai prononcé le mot. Et maintenant je marche sur des œufs. Tout est à prendre avec des pincettes. Elain Aron, psychologue américaine, est l’une des premières à avoir donné un réel sens à ce mot plutôt à la mode ces derniers temps. L’hypersensibilité (sensory processing sensitivity, toujours plus classe en anglais) désigne un tempérament qui implique une plus grande sensibilité du système nerveux que la moyenne. Il a été prouvé qu’un hypersensible traite les informations qui l’entourent de manière plus profonde : le mouvement, les odeurs, le bruit, les émotions ou encore la douleur. L’hypersensibilité serait inscrite quelque part dans nos gènes (des chercheurs l’ont étudiée sur des bébés d’un an qui réagissaient déjà plus fort que les autres à des stimulis extérieurs) et on estime que 20% de la population est doté de ce super-pouvoir. 

Elain Aron a également démontré que les hypersensibles sont plus philosophes que matérialistes, qu’ils n’aiment pas parler pour ne rien dire ou que ce sont de grands créatifs. Ils sont observateurs, repèrent facilement des subtilités imperceptibles pour les autres et éprouvent beaucoup d’empathie (c’est très bien détaillé dans le bouquin de Susan Cain dont je vous ai parlé au 01, là je synthétise des dizaines de pages en quelques lignes). Les études d’Elain Aron sont bien sûr controversées, à juste titre puisqu’il existe des tonnes d’éléments facteurs d’hypersensibilité non liés à la génétique : l’âge, l’alimentation, l’éducation, la culture, les hormones, le rythme de vie, les émotions et j’en passe. Se sentir hypersensible ne veut donc absolument pas dire qu’on l’est de naissance. Mais est-ce bien ça l’important ? 

Je me surprends souvent à trouver le son beaucoup trop fort alors qu’il est adapté pour les autres, à ne pas arriver à suivre une conversation tout en réfléchissant à ce que je vais bien pouvoir dire pour montrer que je participe, à ne pas supporter la moindre tension qu’il peut y avoir entre deux ou plusieurs personnes…. Oui je me sens hypersensible sur les bords. Je me fiche pourtant bien d’appartenir à une catégorie et je ne dis pas que l’hypersensibilité est la réponse à tous mes problèmes, mais mon dieu cela m’a fait du bien de savoir que je ne suis pas malade ! J’ai tout simplement compris pourquoi j’apprécie autant la solitude : me retrouver dans mon moi intérieur me permet de m’échapper du monde extérieur. Bingo. Comprendre l’hypersensibilité me permet désormais d’apprécier mon introversion.

Good news.
Mais on ne sait toujours pas c’est quoi être introverti ?

Introversion.

Saviez-vous qu’un tiers à la moitié des personnes de nos sociétés modernes et occidentales (oui parce qu’en Asie c’est encore différent, mais cela fera sûrement l’objet d’un autre article) sont considérés comme introvertis ? Honnêtement je n’imaginais pas autant. Mais ça me surprend de moins en moins. Voici ce que dit le Larousse : l’introversion est une tendance à se replier sur soi-même, et s’oppose à l’extraversion, un trait de personnalité caractérisé par la volonté d’établir des contacts sociaux et de rechercher des stimulations nouvelles. Le sous-entendu péjoratif de cette définition m’attriste, car c’est pourtant bien plus positif que ça. 

Selon Jung, les introvertis sont attirés par le monde intérieur de la pensée et des émotions, ils rechargent leur batterie dans la solitude et se concentrent sur le sens qu’ils donnent aux événements. Les extravertis, eux, vont vers la vie extérieure, celle des rencontres et de l’action. Même s’il n’existe pas de véritable définition de l’introversion (en fait chacun à la sienne, comme pour tout) les chercheurs s’accordent au moins sur un point : les introvertis sont en équilibre avec peu de stimulations, alors que les extravertis ont besoin d’être beaucoup plus sollicités. Les introvertis agissent de manière plus raisonnée, ont une grande capacité de concentration, et ont des relations certes peu nombreuses mais profondes. Ils ne sont pas nécessairement timides, ils ont simplement une préférence pour des environnements qui ne sont pas sources de stimulation (d’où le lien qu’on peut faire avec l’hypersensibilité). 

Alors pourquoi voir un introverti comme quelqu’un qui se replie sur lui-même plutôt qu’un être humain réfléchi qui a besoin de se ressourcer dans son fort intérieur ? On peut facilement faire un amalgame entre introverti et timide, et je trouve que dans son livre Susan Cain l’a bien formulé : “Le timide redoute de parler alors que l’introverti souffre simplement d’hyperstimulation. Pourtant, aux yeux du monde extérieur, leurs attitudes paraissent identiques”. 

Bon mais alors c’est quoi la timidité ?
J’espère que vous êtes toujours bien accrochés.

Timidité.

“Tu deviens rouge comme une tomate !”, cette phrase incroyable est une véritable formule magique qui a le pouvoir démentiel de me pétrifier. Oui la timidité m’en aura fait voir de toutes les couleurs (j’espère que vous avez noté le jeu de mot), et c’est à cause d’elle que je panique à l’approche de n’importe quel groupe d’inconnus. La timidité, c’est ce manque d’assurance et de hardiesse dans ses rapports avec autrui et la peur de désapprobation ou de l’humiliation sociale. Un trait de caractère qui fait terriblement défaut, nous le savons que trop bien. 

L’ennui, c’est que la société nous inculque dès le plus jeune âge qu’il ne fait pas bon être timide dans un monde où il faut savoir parler haut et fort. Les plus réservés s’en mordront les doigts, parce qu’il s’agit là de quelque chose qui se passe au plus profond d’eux-même et ce n’est pas un trait de caractère facile à changer. Typiquement, la boule au ventre lorsqu’on comprend que l’on va devoir être le centre de l’attention (olala je revois en accéléré toutes mes années d’école là). Toute mon enfance je pensais tristement qu’il y avait les gens “normaux”, et ceux qui souffraient de la terrible maladie de la timidité. Mais non ! La timidité vient pour la plupart du temps d’un tempérament hypersensible qui a été mis à mal (vous savez, quand la confiance en soi en prend un coup parce que dès tout petit on vous désigne déjà comme anormalement en retrait et silencieux). Bon nombre sont timides parce qu’ils ont reçu le message que quelque chose chez eux ne tournait pas rond ou parce qu’ils sont contraints de se protéger des environnements qui les sollicitent trop (c’est donc souvent simplement lié à un tempérament hypersensible ou introverti). Mais la bonne nouvelle, c’est que la timidité, ce n’est pas pour la vie ! Contrairement à l’hypersensibilité (quoique), la timidité se travaille et peut être vaincue. 

Tout comme l’hypersensibilité et l’introversion, l’introversion et la timidité peuvent être liées mais pas systématiquement. On peut être timide et introverti ou timide et extraverti. La logique veut que les introvertis, à force de passer tout ce temps avec eux-même, soient moins à l’aise face aux autres. Hors il existe des introvertis qui n’ont aucune appréhension à s’exprimer en public, et des extravertis complètement dépassés à l’idée de prendre la parole face à des inconnus. Toute cette complexité fait que ce dont je parle ne s’applique pas nécessairement à votre cas. Prenez ce qui vous concerne, et servez-vous du reste pour vous accepter, vous trouver, et améliorer vos relations avec les autres.

Mais qui sont les discrets alors ?

C’est vrai. Je parle d’hypersensibles, d’introvertis, de timides alors que le mot que je préfère est de loin les discrets. Pourquoi ? Parce que pour moi il englobe tout : il ne s’agit pas de nous coller une étiquette sur le front “hypersensible”, “timide”, “introverti”, (finalement vous mettez ce que vous voulez tant que cela vous aide à mieux vous comprendre) mais bien de s’accepter tel que l’on est. Il serait dommage de voir la discrétion comme une fatalité, puisqu’il est possible de la faire évoluer. C’est à nous de choisir le niveau de discrétion qui nous rend heureux. Moi je la prends maintenant comme un pouvoir. L’hypersensibilité me rend extrêmement attentive aux autres. L’introversion me permet d’apprécier la solitude et de rester concentrer pendant des heures sur un sujet qui me passionne (vous n’imaginez pas le bonheur que me procure l’écriture de ces lignes). La timidité est ce sur quoi j’ai envie d’évoluer, pour arrêter de fondre en larme intérieurement lorsqu’il s’agit de prendre la parole devant un groupe. Déjà rien que le fait de l’avoir accepté me rend beaucoup plus détendue, et je ne me reproche plus de ne rien dire. J’essaie de me faire confiance. Je sais que quand j’aurais quelque chose à dire, je le dirai, et cela me rendra d’autant plus intéressante. Mais pour rien au monde j’arrêterais d’être discrète. Parce que ça fait partie de moi, et que j’adore ça.

Quelle fin ! J’en ai des frissons. (sans exagérer un poil)

Ce qui est intéressant à retenir, c’est la différence entre hypersensibilité, introversion et timidité. L’hypersensibilité est un terme de psycho définissant une plus grande sensibilité à son environnement, l’introversion, une tendance à s’intéresser davantage à son intérieur qu’à son extérieur (vous m’avez compris) et la timidité, l’incapacité à parler devant un groupe d’inconnus. Moi j’ai décidé de mettre tout ce petit monde dans le même paquet en utilisant le terme de “discrets” car il existe autant de tempéraments que de personnes sur cette terre, et on ne sera jamais juste l’un ou l’autre tout au long de notre vie. Même si la discrétion est encore sous-cotée aujourd’hui, les discrets ne sont pas moins légitimes à se faire écouter (ils le sont même peut-être plus ehe). Ne vous changez donc pas en extraverti sous pression de la société, vous êtes très bien comme vous êtes. Que vous soyez plutôt hypersensible, introverti ou simplement timide, essayez de faire de la discrétion une force. Vous verrez, ça va payer.

Aller. Je vous laisse méditer là-dessus.
A très vite.
Discrete power.